lundi 7 décembre 2015

Le Front national ne représente que 13,29 % des Français, 8,19 % des Franciliens et seulement 4,76 % des Parisiens (Art.324)



Bleu marine, listes du Front national
Bleu clair, listes de l'Union de la Droite
Fushia, listes de l'Union de la Gauche
Rose, listes Divers Gauche
1. Etant donné le taux de participation, 49,91 %, on peut dire qu’il y a un désaveu massif des Français pour toute la classe politique, toutes tendances politiques confondues. Si on soustrait le vote blanc, 48,71 % des électeurs seulement se sont exprimés hier. C’est la principale leçon de ce 1re tour des élections régionales en France. Les politiques français ne répondent pas à l’attente de la moitié des gens. Il y a donc une véritable une « crise des politiciens » en France. Il ne suffit pas de faire Sciences-Po ou l’ENA, pour devenir un bon politique car les fabriques de politiciens donnent aujourd’hui des hommes politiques déconnectés du terrain et de ses besoins. Je pense aux Républicains et aux Socialistes. En même temps, collé trop au terrain, en caressant les gens dans le sens du poil, donne des hommes populistes déconnectés des sphères du pouvoir et de ses responsabilités. Je pense aux Nationalistes. La moitié des Français ont fait savoir hier, entre autres, que tout ce beau monde ne les séduit pas.

2. La bonne nouvelle du premier tour des élections régionales, n’en déplaise au Front national (FN), c’est de constater que le premier parti de France (qui compte 45 298 641 électeurs au total) est le parti des abstentionnistes et non celui d’extrême droite. Le « parti des abstentionnistes » a recueilli l’adhésion de 50,09 % des électeurs Français, contre 27,73 pour les listes du Front national (6 018 672 personnes), 26,65 % pour celles de l’Union de la Droite (5 785 073 personnes) et 23,12 % pour celles de l’Union de la Gauche (5 019 723 personnes). Malgré tout le tintouin électoral, 22 689 039 de Français, soit plus de la moitié des électeurs, ont boudé leur droit de vote. Ils sont restés sourds à l’appel des urnes. Et pourtant, ce parti virtuel n’intéresse pas les partis politiques établis qu’entre 20h et 20h59, le soir des élections. Après les commentaires de circonstance, on passe au partage du gâteau entre politiciens. Ce fait confirme un théorème démocratique : ceux qui ne choisissent pas, peuvent être sûrs que d’autres choisiront à leur place. Ce constat fait ressurgir l’éternelle question : comment une démocratie peut-elle prendre en compte le vote blanc et l’abstention ? Il existe des pistes de réflexions : imposer le vote obligatoire ou fixer un seuil de participation pour valider une élection. Il faut y réfléchir et en trouver d’autres.

3. L’autre mauvaise nouvelle pour le FN, c’est de déduire à partir du taux élevé d’abstentionnistes que plus de la moitié des électeurs de France considèrent que le FN ne vaut pas plus que le parti des Républicains (LR) ou le Parti socialiste (PS). Ainsi, depuis le 6 décembre, on peut rajouter deux lettres au sigle utilisé par l’extrême droite pour dénigrer les partis républicains, LR (ex-UMP) et PS. L’UMPS est mort, vive l’UMPSFN. C’est l’histoire de l’arroseur arrosé.

4. Un peu moins d’un électeur sur trois, fait confiance au Front national. C’est inquiétant mais pas surprenant. Dire qu’une partie des Français est raciste et xénophobe, serait déplacé. En tout cas, le racisme et la xénophobie se retrouvent dans tous les pays du monde, sans exception. Ils sont particulièrement répandus dans les pays arabes, Liban en tête. Petit détail, 233 599 voix seulement séparent le Front national de l’Union de la Droite. Eh oui, on ne dira jamais assez chaque voix compte.

5. L’année 2015 a été un excellent millésime pour le Front national. Les événements tragiques qui se sont déroulés en France ont offert au parti d’extrême droite des occasions en or pour mieux développer ses thèses contestées et se distinguer des autres partis. En commençant et en se terminant par des attaques terroristes odieuses, l’année 2015 a permis au FN de développer son idéologie sur la sécurité. L’afflux et l’accueil massifs de migrants en Europe au cours de l’année, a permis au parti de Marine Le Pen de développer son idéologie sur l’immigration. Savoir s’il a raison ou s’il a tort sur ses thèses est un autre débat, ce qu’il faut retenir c’est qu’il a bien profité de ces événements tragiques.

6. N’en déplaise à la droite (notamment Les Républicains), le vote au 1er tour des élections régionales n’est pas comme ils le répètent, essentiellement une sanction pour la gauche au pouvoir. La preuve, il n’y a pas eu de report massif des voix des Français vers la droite, mais plutôt vers l’extrême droite. Nuance que la droite n'a pas envie de voir.

7. N’en déplaise à la gauche, se présenter en rangs dispersés conduit toujours au désastre électoral. Le souvenir de Lionel Jospin en 3e position, semble s’estomper dans la mémoire de certains.

8. On peut disserter longuement sur la nature des propositions du Front national, sans parvenir à se mettre d’accord. Une chose est sûre, ce parti est légal et par conséquent, il a le droit de gérer les affaires des Français et gouverner la France. Il n’empêche qu’une partie des Français, pas uniquement de gauche, considère que ce parti ne respecte pas les valeurs républicaines de la France et par conséquent, n’a pas la légitimité de gérer les affaires des Français et gouverner la France. Pour ces Français, il représente même un danger pour la République et pour la France. Partant de ce fait, le Parti socialiste a décidé de retirer ses listes perdantes dans les régions Nord-Pas-de-Calais et Provence-Alpes-Côte d’azur, et a même demandé à ses électeurs de voter pour les candidats de droite, afin de barrer la route au Front national. Les Républicains ont décidé de maintenir leurs candidats dans toutes les régions où ils peuvent le faire, même si cette option risque de porter l’extrême droite au pouvoir régional. On ne peut pas reprocher aux uns et autres leur stratégie. Chacun ses convictions politiques et chacune des deux options a ses avantages et ses inconvénients. Une chose est sûre et certaine : la stratégie de la victimisation, mise en place par Jean-Marie Le Pen il y a belle lurette, est une stratégie payante. « On est exclu, ils se liguent contre nous, tous pareils, on a la solution, ils ne veulent pas prendre en compte vos voix » et j’en passe et des meilleures, tout cela trouve des oreilles réceptives. Je l’ai dit pour les islamistes d’Egypte, « La meilleure façon d’affaiblir les islamistes reste la démocratie et non la dictature. L’illusion islamiste ». Je l’ai redis pour les islamistes de Tunisie. Je le dis, redis et adapte ce principe aujourd’hui au cas français : la meilleure façon d’affaiblir l’extrême droite reste (une application pleine de la) démocratie et non le barrage (républicain). L’illusion front-nationaliste est aujourd’hui brimée par ce dernier, qui est bien exploité par le parti concerné dans sa stratégie de victimisation.

9. Les résultats de Paris et la région parisienne se singularisent encore et toujours, par rapport au reste de la France. Le taux d’abstention est à peu près le même : 50,09 % pour la France entière, 54,11 % pour l’Ile-de-France et 49,46 pour Paris. Le désaveu de la classe politique est donc le même. Et pourtant, malgré une participation comparable, les candidats d’extrême droite enregistrent un score nettement inférieur au score national : le Front national décroche un 27,73 % pour la France entière, par contre, sa tête de liste Wallerand de Saint-Just ne recueille que 18,41 % des voix en Ile-de-France et seulement 9,65 à Paris. Valérie Pécresse, la tête de liste de la droite récolte 30,51 % des voix des Franciliens et 32,92 % des voix des Parisiens, quand Claude Bartolone recueille 25,19 % des voix des Franciliens et 31,41 % des voix des Parisiens. Chiffres à méditer.

10. Allons plus loin. Si on rapporte le nombre de voix obtenues par le Front national par rapport au nombre d’électeurs inscrits, ceux qui se sont exprimées et ceux qui se sont abstenues, et si on postule que les électeurs sont représentatifs de l’ensemble des Français, on constate que le Front national fait pschitt, pour reprendre la célèbre onomatopée de l’ancien président de la République française, Jacques Chirac. Ainsi, l’extrême droite ne représente en réalité que 13,29 % des (électeurs) Français, 8,19 % des (électeurs) Franciliens et tenez-vous bien, seulement 4,76 % des (électeurs) Parisiens. Ah, on peut tout faire dire aux chiffres, même la vérité. Comme il fait bon d’être Parisien de nos jours ! Si j’ai tenu à souligner ce constat, c’est dans le but d’informer les Français en général, mais surtout les doubles nationaux Franco-libanais en particulier, qu’un Parisien malgré tous ses défauts, a 95,24 % de chance de ne pas être sympathisant du Front national. Avis aux amateurs. En tout cas, il serait intéressant de connaître d'où vient l'immunité parisienne contre le FN. Le niveau socio-culturel, la mixité sociale, le brassage ethnique et l'exposition touristique y sont sûrement pour beaucoup.