jeudi 26 juillet 2018

Emmanuel Macron : la France avait un chef d'Etat, elle a désormais un grand président! Merci surtout au journal « Le Monde », au comandante Mélenchon et à Alexandre Benalla (Art.549)


Près d'une semaine après le début de l'affaire Benalla, le chef de l'Etat a décidé de s'exprimer pour la première fois sur ce sujet mardi soir, loin des caméras et des journalistes, filmé avec un simple téléphone portable, devant les députés LREM qui étaient réunis à Paris pour clore la session parlementaire. Le lendemain, mercredi soir, alors qu'il était en déplacement dans les Hautes-Pyrénées, il l'a fait devant la presse, reprenant les points développés la veille, avec beaucoup de sarcasme. Jeudi soir, il en a remis une couche. C'est parce ces trois interventions sont exceptionnelles que j'ai décidé de rédiger cette note et d'en transcrire un large pan.

Emmanuel Macron lors de son voyage en Suède, le 17 novembre 2017
Photo : Phlippe Servent / Présidence de la République

Sur la forme, le président de la République a expliqué que c'était à lui de « choisir les moments » de parler et à ne pas se les faire dicter, d'autant plus qu'il n'avait pas à le faire pendant que « la justice fait son travail » et lorsque « les esprits s'embrasent pour être des participants d'une mêlée ». Il a fustigé au passage « ceux qui défendent la République (…) et l'oublient rapidement, quand il s'agit au fond de leur but ultime dans cette affaire, de salir le président de la République ».

L'affaire Benalla vue par Plantu, un régal!

Sur le fond, l'intervention devant les parlementaires se divise en plusieurs parties. Il a commencé la première partie, consacrée aux faits, en s'attaquant à ce qu'il a qualifié de « fadaises » dites par les mêmes, qu'ils soient « parlementaires, commentateurs ou journalistes ».

Ainsi, on apprend « qu'Alexandre Benalla n'a jamais détenu les codes nucléaires (comme l'a cru un député LR), n'a jamais occupé un 300 m2 à l'Alma, n'a jamais gagné 10 000 €/mois et que lui non plus n'a jamais été mon amant. » Mais encore, « Alexandre Benalla est quelqu'un qui nous a accompagné durant la campagne, avec beaucoup de courage et d'engagement (…) je n'ai pas à (l')oublier. »

Macron a rappelé qu'une fois la campagne était terminée, il fallait constituer des équipes à l'Elysée de « gens qui connaissent l'Etat » et de « gens qui étaient engagés à mes côtés durant la campagne (…) comme ça a toujours été le cas d'ailleurs. »

Certes, Alexandre Benalla avait « beaucoup fait » durant l'année qui s'est écoulée et avait gagné « la confiance », mais ce qui s'est passé le 1er mai, en dehors de sa fonction, en tant « qu'observateur », est pour le président de la République « grave et sérieux », vécu comme « une déception et une trahison ».

Il n'en dira pas plus car des enquêtes sont en cours, mais Emmanuel Macron a tenu à rappeler que « le lendemain (2 mai), mes collaborateurs à l'Elysée ont pris une sanction et il m'en a été rendu compte. Elle a été jugée proportionnée car il y avait un contexte et des circonstances que l'enquête de l'IGPN comme la justice éclaireront ». Avec force il a affirmé « qu'à aucun moment, ceux qui dirigent mon cabinet, n'ont caché cette affaire (…) Mes équipes à l'Elysée ont fait ce qu'ils devaient faire... La justice et d'autres pourront dire s'il y a eu des erreurs et si on n'a pas été conforme au Code de procédure pénale ou autre (…) Moi j'ai considéré que c'était proportionné à ce moment là, j'assume. »


La seconde partie est sans aucune doute, un moment clé de son mandat, l'acte de foi d'un grand président de la République. Et comment!

Un grand président est celui qui assume pleinement ses responsabilités. « Dans notre République, depuis un an, il n'y a eu qui que ce soit protégé ou soustrait au droit de la République. C'est ce que nos concitoyens attendent de nous. Et s'ils cherchent un responsable, dites-leur... Le seul responsable dans cette affaire, c'est moi et moi seul... Parce que celui qui a fait confiance à Alexandre Benalla, c'est moi, le président de la République. Celui qui a été au courant et qui a validé l'ordre, la sanction de mes subordonnés, c'est moi et personne. »

Un grand président est celui qui se met en première ligne. « Les valeurs qui nous ont fait, ce qui nous a conduit là, ce n'est pas la République des fusibles, ce n'est pas la République de la haine, celle où on fait traquer un fonctionnaire ici, un collaborateur là. On ne peut pas être chef par beau temps et vouloir se soustraire lorsque le temps est difficile. S'ils veulent un responsable, il est devant vous, qu'ils viennent le chercher. Ce responsable répond au peuple français, au peuple de France et à personne d'autre. »

Un grand président est celui qui protège ses troupes. «  La République tient quand chacun assume ses responsabilités. J'assume les miennes... Mes collaborateurs assument. Vous avez vu le préfet Strzoda (Patrick, directeur de cabinet du président de la République) aujourd'hui, avec une immense dignité (devant la commission parlementaire), parfois traité d'une manière que je ne qualifierai pas. Le Premier ministre assume ses responsabilités. Et les ministres les assument... Nous avons une Constitution, elle fixe les responsabilités. »


La troisième partie est consacré au spectacle lamentable de gens aux abois, du monde politique comme du monde médiatique, qui œuvrent désespérément pour faire d'un fait divers une affaire d'Etat, chacun ayant ses propres raisons.

En préambule, le président de la République a tenu à faire savoir : « J'assume ce qui a été fait par mes collaborateurs et je condamne la gravité des actes commis par Alexandre Benalla, en considérant aussi que cela ne lui enlève pas le reste et que ça ne lui enlève pas la dignité. » Là aussi, on retrouve une autre caractéristique d'un grand président qui sait se séparer d'un collaborateur s'il le faut, mais qui demeure reconnaissant eu égard au travail accompli. Devant la presse, Macron a répété : « Je suis fier de l'avoir embauché à l'Elysée, parce que je considère que c'était quelqu'un de dévoué, qui avait un parcours différent . Il a fait beaucoup de bonnes choses quand il était à l'Elysée. » Cependant, il a commis une « faute réelle et grave » pour laquelle il a été sanctionné (mis à pied). « Quand il a fait une seconde faute, il a été sanctionné plus durement (licenciement) ».

Mais encore, un grand président ne se laisse pas impressionner par ses adversaires, malgré la virulence de leurs propos et de leurs procédés. Sur le front médiatique, il avait beaucoup à dire.

Mardi. « Ce que je regarde depuis quatre jours, c'est un spectacle où la tentation pour presque tous les pouvoirs est de sortir de son lit. Nous avons une presse qui ne cherche plus la vérité. Elle disait ce matin, "regardez, un directeur de la préfecture de police a dit que c'était faux", il dément quelques heures plus tard, on l'entend à peine. On dit "regardez les images tournent en boucle" d'une scène inadmissible, et que je condamne, on ne voit jamais la scène d'avant ou la scène d'après, quel est le contexte, que s'est-il passé? S'agissait-il d'individus qui buvaient gentiment un café en terrasse? Que s'est-il passé juste ensuite? J'ai cru comprendre qu'il y avait des images, où sont-elles? Sont-elles montrées avec la même volonté de rechercher la vérité et d'apporter de manière équilibrée les faits (Macron fait allusion à d'autres images publiées par France 3 après les révélations du Monde, évoquées dans mon premier article sur l'affaire, où l'on voit clairement les deux présumées victimes jeter des objets en verre sur les CRS tout en les insultant)? Non. Je vois un pouvoir médiatique qui veut devenir un pouvoir judiciaire, qui a décidé qu'il n'y avait plus de présomption d'innocence dans la République et qu'il fallait fouler aux pieds un homme et avec lui toute la République. »

Mercredi. Et belote. « La presse aussi se trompe parfois, mais il faut qu'elle se corrige. Et à ce moment-là on lui pardonne (...) Beaucoup de gens ont perdu la raison. Beaucoup ont dit des choses fausses et oublient de les corriger (...) Vous avez dit ces derniers jours beaucoup de bêtises sur soi-disant des salaires, des avantages. Tout ça était faux, et c’est important de le dire aux Français... Ce qui a été dit aux Français pendant des jours et des jours était des fadaises. »
Et rebelote. « Les gens qui sont en charge du cabinet de l'Élysée - ce n'est pas le président de la République - ont pris leurs responsabilités, et les décisions qu'ils ont prises, je les ai approuvées. Je ne vais pas chercher des fusibles parce que vous avez envie de voir du sang et des larmes dans le tournant de l'été. »

Sur le front politique : « Nous assistons à la coalition baroque qui ne trompe personne dans notre pays, de ceux qui prétendent provenir du gaullisme et qui en ont oublié tous les principes et la dignité, et des extrêmes qui eux sont cohérents dans leur recherche, ils n'aiment pas l'Etat et ils veulent basculer la République. »

Un grand président sait aussi résister au populisme. « Je ne donnerai pas des têtes parce que je ne fonctionne pas comme ça. Quand après une analyse rigoureuse les responsabilités sont définies, elles doivent s'exercer... Lorsque nous en sommes encore au stade de l'élucidation de la vérité, on ne sacrifie pas des fonctionnaires, des collaborateurs et des ministres sur l'autel des émotions populaires et de la démocratie d'opinion instantanée. »

Enfin, un grand président a un esprit clair, une vision globale et un cap. « Dans ce contexte chacun doit garder son calme et chaque pouvoir doit être au cœur de son exercice (…) Je veux que la justice fasse calmement son travail jusqu'au bout. Elle devra mettre en lumière les faits... et définir les responsabilités. Toutes les conséquences en seront tirées. Il appartient aux médias de faire leur travail calmement... avec un rapport au réel et à la vérité qui doit toujours être questionné (…) J'aurai aussi à demander au Premier ministre et à plusieurs ministres des éclairages sur d'autres faits ou des réformes qui au vu de ce que nous sommes en train de vivre s'imposent. C'est pour cela l'Elysée fera son travail et que j'ai demandé au Secrétaire général conformément à notre Constitution de me faire des propositions. »

Emmanuel Macron, candidat à la présidence de la République
Salon de l'Agriculture, 1er mars 2017 (photo perso)

Non seulement Emmanuel Macron agit comme il se doit et fait un sans faute dans l'affaire Benalla, mais étant intelligent, réactif et pragmatique comme il est, il sait en tirer profit d'une manière magistrale. Ces trois interventions en apportent la preuve. L'affaire Benalla permet à Emmanuel Macron de muer d'un chef d'Etat à un grand président, et encore, indépendamment de sa politique. Il est fort le Macron !

La faute originelle dans cet emballement estival revient incontestablement au journal Le Monde, suivi par L'Express et d'autres médias, qui ont cherché d'une manière explicite à transformer un fait divers en une affaire d'Etat, avec comme objectif principal, atteindre Macron : « La mécanique d'une affaire d'Etat » / Le Monde et « Comment un fait divers devient une affaire d'Etat » / L'Express, avec une variante pour Mediapart, qui pour la peine a créé un dossier dont le titre exprime explicitement les intentions, « L'affaire Macron-Benalla ». Des fadaises oui, ce n'est point « une affaire d'Etat » comme l'a dit et répété le président de la République. Foutaises même, comme je l'ai démontré dans mon article « Alexandre Benalla, une affaire d'Etat qui risque de faire pschitt ».

Le Monde et d'autres médias, ne digère pas le fait qu'un président de la République se fasse rare, qu'il réussisse à verrouiller sa communication et qu'il mette en oeuvre son propre canal d'information, une stratégie ingénieuse qui le place à l'abri du bon vouloir du « pouvoir médiatique » et des turbulences journalistiques (« L’Elysée boute les journalistes hors du palais » / Le Monde). Ils ont tenté de le contrecarrer et de lui rappeler que ce sont eux qui font la pluie et le beau temps. Ils ont échoué et on ne peut que s'en féliciter. Leur attitude est d'autant plus condamnable, que les préoccupations pécuniaires n'étaient probablement pas loin. Une « affaire d'Etat » dans une période creuse, en plein été alors que la France croule sous un soleil de plomb, aurait prolonger l'embellie du Mondial et booster les ventes. En période de vaches maigres pour la presse, c'est toujours ça de pris. Raté. L'affaire d'Etat a beau faire pschitt au fil des jours, « Le Monde » s'accroche à son enquête à charge. Son dernier titre en date : « Emmanuel Macron espère tourner la page Benalla ». Comme les Belges, ils sont en plus mauvais perdants!


Du côté des politiques, c'est un désastre, de l'extrême gauche à l'extrême droite, en passant par la gauche et la droite. On n'a fait que surfer sur la vague créée par les médias. A défaut de bousculer Macron de son piédestal politique, ils ont essayé d'égratigner sa stature présidentielle.

« L'affaire Benalla » confirme donc que certains journalistes font mal leur boulot, que les partis traditionnels sont toujours aussi mauvais et que Macron mérite son surnom de Jupiter. De ce fait, il est sûr que la méfiance des citoyens par rapport aux grands médias grandira, la traversée du désert des partis politiques traditionnels durera et plus fort Macron sortira. Comment voulez-vous qu'il en soit autrement? On dit ce qui ne tue pas rend plus plus fort. C'est vrai. Mais qu'en sera-t-il, si à la base, on est déjà fort comme Macron et si ceux qui cherchent à le « tuer », ne font que l'égratigner?

Ah, où est-ce j'avais la tête, j'ai failli oublier, un grand président a du sang froid et évidemment du sarcasme. Mercredi, en déplacement à Bagnères-de-Bigorre, Emmanuel Macron a relevé le fait que « la chaleur et la fatigue, c'est à Paris que ça monte à la tête », pas dans les Hautes-Pyrénées. Aujourd'hui jeudi, il en a remis une couche : « J’ai dit ce que j’avais à dire, c’est-à-dire que je crois que c’est une tempête dans un verre d’eau. Et pour beaucoup, c’est une tempête sous un crâne! » Mais oui, un degré de différence, ça va, mais six à neuf degrés, bonjour les dégâts!


Post-scriptum : Les dernières nouvelles de « l'affaire Benalla Pschitt » en vrac 

- La frustration grandit au sein des députés de l'opposition, ils n'arrivent pas à en tirer profit comme ils pensaient. Pourtant, la commission parlementaire leur avait donné du pouvoir, donc de l'espoir, de juger Jupiter plutôt que de chercher la vérité sur ce qui s'est passé ce 1er mai. Comandante Mélenchon (ex-Alliance bolivarienne) et Benoit Hamon (ex-PS) avaient projeté auditionner le président de la République, Florian Philippot (ex-FN) allant jusqu'à décréter que Macron devrait envisager quitter ses fonctions ! Raté. Les voilà donc tous se retirant les uns après les autres. Les Républicains, les Insoumis, le Rassemblement national, le Parti communiste, etc.

- Après Les Républicains, c'est autour de La France insoumise et la Gauche démocratique et républicaine, d'envisager recourir au coup d'épée dans l'eau, pour éclabousser Jupiter, en déposant une motion de censure contre le gouvernement d'Edouard Philippe. Comandante Mélenchon déclarant même qu'il votera la motion de la droite.

- Les deux victimes de la violence d'Alexandre Benalla le 1er mai, pourraient elles aussi faire l'objet de poursuites judiciaires. Le parquet de Paris a ouvert une enquête préliminaire concernant les violences commises place de la Contrescarpe. D'après des vidéos tournées le 1er mai et le témoignage de Benalla, outre les insultes, l'homme a lancé une bouteille en verre sur la tête d'un CRS et la femme a jeté une chaise.

- Coup de théâtre jeudi, « Alexandre Benalla livre ses vérités ». A qui svp, au « Monde ». Parmi la soixantaine de demandes d'interview qu'il a reçues, il a choisi le journal qui l'a identifié sur une vidéo molestant des manifestants, ce qui a conduit à son licenciement (après s'être procuré les images illégalement). Attention, c'est un « entretien exclusif ». Pour le lire, il faut soit acheter le journal papier, soit s'abonner en ligne. Affaire d'Etat et entretien exclusif, non mais quelle aubaine ce Benalla! En tout cas, voici les points les importants de l'interview :
. L'homme était serein, selon l'un des journalistes présents. Il confirme que son salaire est de 6 000 euros comme l'a dit Emmanuel Macron (et non 10 000 € comme l'ont avancé les médias). Sa fonction était de gérer « les affaires privées du président ». Le logement qui lui a été attribué fait 80 m2 (et non 300 m2 comme l'a avancé L'Express).
. Il s'est rendu en tant « qu'observateur » à la manif du 1er mai, « invité » par le chef d’état-major à la préfecture de police, Laurent Simonin (aujourd'hui mis en examen).
. Il comprend la « déception » du président, mais ne considère pas l'avoir « trahi ». Il a le sentiment d'avoir commis une « grosse bêtise » et « assume ».
. N'étant pas du système, il révèle que sa vie à l'Elysée l'a conduit à avoir des « frictions » avec les groupes chargés de la sécurité du président de la République.
. Il ne se fait pas d'illusion sur « les gens qui ont sorti cette information » : « On a essayé de m’atteindre, de me "tuer", et c’était l’opportunité aussi d’atteindre le président de la République ». La messe est dite.