mercredi 23 novembre 2016

François Fillon, une aubaine ou un danger public pour la France et le Moyen-Orient? (Art.404)


"En mars 2013, le président russe invite
François Fillon, qui n'est plus que député de
Paris, dans sa datcha près de Moscou"
(Reuters/Alexei Druzhinin/RIA Novosti)
L'Express, 29 janvier 2014
Selon le bon vieux dicton français, au premier tour, on choisit, et au deuxième, on élimine. C'est chose faite, en partie. Sauf qu'il ne s'agit pas d'une élection, mais d'une présélection à laquelle 90% des Français n'ont pas jugé utile de participer. Ayons la présence d'esprit de s'en souvenir quand même ! Le tiercé gagnant de la soirée électorale de dimanche n'a surpris personne en France. Ce qui surprend réside ailleurs.

1. Les Français qui « partageant les valeurs républicaines de la droite et du centre » et qui ont accepté de participer à la Primaire organisée par le parti « Les Républicains » pour désigner le candidat à l'élection présidentielle de 2017, ont choisi de qualifier François Fillon, l'outsider, et Alain Juppé, longtemps favori, pour le second tour. Nicolas Sarkozy a été éliminé dès le premier tour. A vrai dire, il n'avait aucune chance de revenir sur le ring, il aurait été éliminé au second tour. L'ancien président de la République traine beaucoup de casseroles derrière lui qui rendaient son discours totalement inaudible pour l'écrasante majorité des Français.

2. Le grand perdant de la Primaire, le troisième homme, bénéficie tout de même d'un lot de consolation. Par son ordre d'arrivée et son score (20,6 %), il est devenu en réalité le faiseur de roi de ce scrutin. En décidant de voter pour Fillon (44,1 %), il fait de son ancien Premier ministre, le nouveau favori du second tour, au détriment de l'ancien favori, Alain Juppé (28,5 %). Ce soutien, tout à fait prévisible, est pourtant un cadeau empoisonné pour l'intéressé. Il rappelle à tous les Français, particulièrement ceux de droite, que le couple Sarkozy-Fillon a été uni par les liens d'un mariage politique conclu entre 2007 et 2012. C'est le désaveu des Français en 2012 qui les a poussé au divorce.

3. Depuis lundi, tout le monde disserte sur l'engouement des Français pour les Primaires. A droite, on se targue d'avoir battu le seul record de participation existant, et à gauche, on s'enorgueillit d'avoir été les premiers à ouvrir la voie en 2012. Il a échappé à tout ce beau monde, qu'avec 4,3 millions de votants sur plus de 44,8 millions d'électeurs inscrits, on n'a même pas pu franchir la barre symbolique des 10 % de participation. Fillon, ce grand vainqueur de la Primaire (44,1 % des votants), qui arrive en tête avec des sourcils en bataille, n'a obtenu que 1 881 857 voix. Pour mesurer la gravité de ce résultat, il faut se projeter au-delà de la Primaire. Ce n'est qu'un secret de Polichinelle, la France pourrait opter pour l'alternance en mai. Le vainqueur de ce premier tour de primaire est donc en pole position pour remporter la course présidentielle. Ainsi, dimanche 20 novembre, on a pratiquement décidé que François Fillon, qui n'a récolté que 4,24 % des voix des Français inscrits sur les listes électorales, mérite d'être le 25e président de la République française. Stupéfiant ! Quelle légitimité peut bien avoir un Fillon qui a été désigné par un scrutin privé pour courir l'élection présidentielle auquel près de 90 % des électeurs n'ont pas pris part ? C'est absurde. Plus grave encore, dire que cet homme veut imposer à la France un programme ultra-libéral et changer radicalement le positionnement de la France sur la scène internationale, sachant que près de 96 % des Français ne l'ont pas mandaté pour ça ! C'est tout simplement consternant. Les primaires, qu'elles soient de droite ou de gauche, en France ou aux Etats-Unis, sont une mascarade électorale, inventée pour biaiser l'expression démocratique des peuples. Elles n'ont aucune justification démocratique et ne feront que favoriser le populisme dans le monde à l'avenir. Il faut y mettre un terme au plus vite.

4. François Fillon, le candidat pressenti pour devenir le futur président de la République, comme l'ont décidé 4,24 % des électeurs français, est un extraordinaire prestidigitateur. Il a réussi à redorer ses 5 années passées à Matignon, il y a à peine 5 ans, où il a mené conjointement avec Nicolas Sarkozy une politique qui a été sanctionnée par les Français en 2012, où la dette de la France avait augmenté de près de 600 milliards d'euros, soit plus de 50% par rapport à 2007. Du jamais vu ! Ce bilan désastreux n'a pas empêché l'ex-Premier ministre de se commander un costard présidentiel sur mesure pour se représenter aux Français comme un homme nouveau, le réformateur providentiel, le seul homme politique capable de redresser une France au bord de « la faillite ». Bienvenue dans le surréalisme politique français et longue vie à l'hypnotiseur candidat illusionniste. Tout cela est merveilleux sauf que l'habit ne fait pas le moine. Si en 5 ans, il n'a pas su redresser la France, il est illusoire de croire qu'il pourra réussir en 10 ans. Si en 5 ans, il a fait passer la dette publique de 65% du PIB de la France (2007) à 90% du PIB (2012), le pire est à venir sous une présidence Fillon. On raille la présidence socialiste qui a pris la relève du duo Sarkozy et Fillon, sauf que sous Hollande et Valls, la dette publique de la France a été limitée à 96% du PIB du pays (2017). Dans tous les cas, mettre toute la faute de la sévère sanction de 2012 sur le dos de Sarkozy, est encore pire pour Fillon. Cela signifie que l'ex-Premier ministre était un exécutant qui n'a jamais eu le cran de s'opposer à l'ex-président de la République. Il n'a donc pas la carrure pour assumer les hautes fonctions d'un chef d'Etat. Pour résumer la situation de de François Fillon, je reprendrai le réquisitoire de l'ancien Premier ministre socialiste, Laurent Fabius, contre Nicolas Sarkozy en 2012 : « Votre bilan, c'est votre boulet... Pourquoi voulez-vous que ce qui n'a pas marché pendant cinq ans fonctionne maintenant ? »

5. Quelque soit l'heureux élu, pour gouverner, il devra s'appuyer principalement sur son camp, « Les Républicains ». L'élection présidentielle aura lieu en deux temps, le 23 avril et le 7 mai 2017. Les élections législatives se dérouleront le 11 et 18 juin 2017. En attendant, la bonne nouvelle du 1er tour de la Primaire de la droite et du centre, c'est qu'enfin, un vrai débat d'idées peut s'engager. Dans ce cadre, rappelons quand même et d'emblée, que Fillon et Juppé font partie de la même famille politique, oui la même famille politique, la droite. Leurs programmes se rejoignent, eh oui, et sur beaucoup de points svp.

- Impôts et Taxes : hausse de la TVA ; suppression de l'ISF (impôt de solidarité sur la fortune) ; baisse des droits sur les donations ; baisse de l'impôt sur les sociétés ; baisse des cotisations patronales et salariales ; réduction des dépenses publiques ;
- Emploi : faciliter les modalités de licenciement ; organiser des référendums d'entreprise en cas de blocage syndical ; reformer le code du travail ;
- Retraite : hausse de l'âge de départ à la retraite de 62 à 65 ans ; alignement des retraites du secteur public sur celles du secteur privé, avec suppression des régimes spéciaux de retraite ;
- Fonctionnaires : suppression de postes de fonctionnaires (250 000 pour Juppé, 500 000 pour Fillon) ; rétablissement des jours de carence dans la fonction publique ;
- Ecole : autonomie pour les collèges et les lycées ;
- Sécurité : création de nouvelles places de prison ; déchéance de nationalité des seuls terroristes binationaux ; double peine ;
- Immigration : établissement de quotas annuels pour l'immigration par le Parlement ; négociation d'un nouveau traité pour remplacer Schengen ;
- Divers : opposition à la PMA (procréation médicalement assistée) pour les couples homosexuels et à la GPA (gestation pour autrui).

6. Comme on vient de le voir,François Fillon et Alain Juppé se rejoignent donc sur l'essentiel. L'un et l'autre défendent des programmes nettement marqués à droite. Ainsi, si vous êtes de sensibilité de gauche, circulez, il n'y a rien à voir dans cette Primaire, encore moins à espérer. Quoiqu'en lisant jusqu'au bout, vous risquez de changer d'avis. Et si vous êtes de sensibilité de droite ou du centre, décidés ou indécis, n'oubliez surtout pas, le diable se cache dans les détails. Il existe de différences claires et nettes entre les deux candidats. Qui veut voter d'une manière responsable et citoyenne, se doit de les connaître.

7. François Fillon mérite largement le tire de l'éditorial du journal Le Monde, « Droite thatchérienne contre droite chiraquienne » et sa caricature dans Libération, où on le présente sous les traits de son idole, Margaret Thatcher. L'ex-Premier ministre de Nicolas Sarkozy, un détail qu'il ne faut pas perdre de vue, défend des idées inquiétantes à juste titre et raison. Sa politique est :

- ultra-libérale sur le plan économique (suppression des 35 heures, la durée de travail devra être fixée par les entreprises dans la limite de 48 heures/semaine ; rendre les allocations chômages dégressives sans minimum garanti ; suppression de l'encadrement des loyers, comme à Paris) ;
- ultra-libérale sur le plan de la santé (focaliser l'assurance-maladie sur les affections graves ou de longue durée, pour le reste, « malades, débrouillez-vous! », dans le privé pour ceux qui en ont les moyens, sans même proposer un encadrement des tarifs des mutuelles ; selon l'actuel ministre de la Santé, « chaque foyer paiera en moyenne 3 200 euros de plus par an pour se soigner »; introduction d'une franchise universelle ; suppression de la généralisation du tiers payant ; suppression de l'aide médicale d'Etat ; 
- peu soucieuse des risques pour l'environnement (suppression du principe de précaution ! ; prolongation de l'exploitation des centrales nucléaires de 40 à 60 ans) ;
- conservatrice sur les questions de société (suppression de l'adoption plénière pour les couples homosexuels ; rappelons que François Fillon est opposé à l'avortement et a voté en 1982 contre la dépénalisation symbolique de l'homosexualité en France) ;
- irréaliste (suppression de 500 000 postes de fonctionnaires; augmentation de la durée hebdomadaire de travail des fonctionnaires sans augmentation de salaire) ;
- conflictuelle (« passer le statut de la fonction publique à la paille de fer »)
- populiste (voter une loi anti-burkini, comme si le Conseil d'Etat ne s'est jamais prononcé contre cette dérive juridique qui viole plusieurs des libertés fondamentales en France) ;
- méprisante pour les petits pays (« déchéance de la nationalité française des jihadistes et interdiction de retour en France pour les combattants terroristes partis en Syrie ou en Irak » ; c'est une violation du droit international; comme si c'est aux autres pays du monde de s'encombrer des Français terroristes, nés, élevés et éduqués en France !);
- déshonorante pour la France : pro-Poutine, pro-mollahs et pro-Bachar (lever l'embargo contre la Russie ; renforcer le dialogue avec l'Iran ; coopérer avec Poutine en Syrie)

8. Alain Juppé lui, défend clairement des idées de droite, comme on l'a vu précédemment (ex. suppression du compte pénibilité). Toutefois, sa politique se distingue de celle de Fillon sur plusieurs points. Elle apparait quand même plus :

- réaliste (suppression de 200 000 à 250 000 postes de fonctionnaires ; augmentation du temps de travail hebdomadaire à 39 heures/semaine, négociable selon les besoins des entreprises ; pas question de faire travailler les fonctionnaires plus, sans les payer plus) ;
- centriste (baisse de l'impôt sur le revenu ; rendre les allocations chômages dégressives si la situation économique s'améliore, avec un minimum de 870 euros/mois ; pas question de dégressivité sans aucune garantie et quelque soit le contexte économique) ;
- modérée (moderniser la gestion de la fonction publique ; pas question de paille de fer!) ;
- rassurante (maintien d'un taux de prise en charge des dépenses de santé à 75%, pas question de limiter le champ de la Sécurité sociale aux maladies graves seulement ; conduire des recherches agronomiques, en gardant le principe de précaution, pas question d'ouvrir la boite de Pandore) ;
- réfléchi (pas question de loi sur le burkini car il faut « résister à la tentation d'exiger des lois de circonstance au fil des polémiques médiatiques ») ;
- progressiste (adoption par les couples homosexuels) ;
- ferme (conditionner le droit du sol à la régularité du séjour ; isoler les détenus radicalisés ; mettre en œuvre tous les outils de l’état d’urgence ; redéployer 4500 policiers et gendarmes ; rétablir les peines planchers pour certains condamnés; 
- respectueuse du droit international (pas question de laisser les "terroristes français", nés et élevés en France, aux autres pays du monde) ;
- honorable pour la France : clairement anti-Daech et anti-Assad ; pas question de s'aligner sur l'axe Moscou-Téhéran-Damas.

9. Il y a une différence majeure entre les deux candidats de droite qui mérite d'être traitée à part. C'est celle portant sur la politique étrangère de la France, notamment en ce qui concerne la Russie et le Moyen-Orient. En optant pour la realpolitik, qu'il justifie par les impératifs de combattre le terrorisme et protéger les Chrétiens d'Orient, François Fillon se place clairement aux côtés de Vladimir Poutine et de Bachar el-Assad. Qu'il le veuille ou pas, ce positionnement déshonore la France et la rend complice des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité qui sont commis en Syrie. On peut combattre Daech sans légitimer pour autant le tyran de Damas. Telle est la position d'Alain Juppé. Elle honore la France.

10. Si l'Amérique de Bush a permis la création de Daech, l'Etat islamique en Irak et au Levant, par le biais d'une invasion et d'une occupation stupides de l'Irak (2003-2011), la Russie de Poutine a offert à l'organisation terroriste les conditions nécessaires pour se développer et menacer le monde, par le biais d'un soutien infaillible à la tyrannie des Assad et d'une intervention non moins stupide en Syrie (2011-2016). Poutine a bloqué cinq résolutions du Conseil de sécurité sur la Syrie, c'est pour dire. Bachar el-Assad est certes un grand criminel de l'histoire, mais il est aussi un pragmatique. La preuve, son retrait inespéré du Liban en 2005, après une occupation du pays du Cèdre de 29 ans, sous une double pression interne (manifestation monstre du 14 mars 2005) et externe (le forcing Chirac-Bush et des résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU, notamment la résolution 1559, adoptée le 2 septembre 2004). La pression interne existait en Syrie, via les manifestations pacifiques durant l'année 2011. Il ne manquait que la pression externe. Ça n'a jamais été possible à cause de Poutine. Il est clair aujourd'hui, avec le recul dont on dispose, que si les pays occidentaux avaient pu imposer la 1ère résolution sur la Syrie en octobre 2011 ou même la deuxième en février 2012, la France était gouvernée par François Fillon soit dit au passage (on venait à peine de dépasser le seuil des 5 000 morts en Syrie et 5 000 réfugiés syriens au Liban ; Daech n'était pas encore installée en Syrie, elle n'existait même pas en tant que telle, il n'y avait que l'organisation « Etat islamique d'Irak »!), avant la militarisation et la généralisation du conflit (en 2012), le tyran de Damas se serait plié, « l'Etat islamique d'Irak » n'aurait jamais pu s'étendre vers la Syrie et donner naissance à « l'Etat islamique en Irak et au Levant », Daech, le sinistre acronyme que tout le monde connait aujourd'hui. Il était possible d'éviter les 300 000 morts en Syrie, le déplacement de 2 millions de ressortissants syriens au Liban, l'afflux de jihadistes au Moyen-Orient, des millions de migrants vers l'Europe et des dizaines d'attaques terroristes dans le monde. Mais c'était sans compter sur la détermination de Poutine et la mollesse des pays occidentaux, notamment de la France de Sarkozy-Fillon !

11. Plus grave encore, en s'aventurant sur le terrain des « Chrétiens d'Orient », François Fillon ne se rend même pas compte à quel point il menace la pérennité de la présence chrétienne en Orient. En juin dernier, lors de sa visite au Liban, il s'est montré soucieux sur ce problème. « Les tentatives d’élimination de la présence chrétienne au Moyen-Orient mèneront à des affrontements et un avenir dangereux ». Et alors, que faire ? La réponse est tombée quelques semaines plus tard où il a prôné « une alliance militaire et tactique avec Bachar el-Assad ». Et nous n'avons qu'à fermer les yeux sur les 300 000 morts qu'il a provoqués, n'est-ce pas ? Idem pour sa porte-parole, Valérie Boyer, l'une des cinq députés républicains qui ont eu l'indécence au printemps dernier, d'aller acheter des mugs-souvenirs dans les souks de Damas à l'effigie de Bachar el-Assad, à quelques kilomètres seulement des zones gazées au sarin par le dernier tyran des Assad (21 août 2013 ; 1429 morts, dont 426 enfants). Après avoir affirmé que « Mon devoir était d'être auprès des minorités, auprès des Chrétiens d'Orient », elle a le culot d'asséner à la suite de la rencontre avec ce dernier que « Bachar el-Assad est serein... Il va gagner la guerre ». Les positions de Fillon et de Boyer sont avant tout indignes des enseignements de Jésus-Christ et du christianisme. Leur solidarité empoisonnée est d'une part, honteuse car sélective, ne prenant pas en compte la souffrance des communautés musulmanes, et d'autre part, méprisable car élective, en faisant du tyran de Damas, le sauveur de ses opprimés.

12. Toujours est-il que c'est au cours du dernier débat télévisé que le champion de la Primaire a bien montré à quel point ses connaissances sur le Moyen-Orient étaient primaires. « Si Bachar al-Assad est toujours là, c'est parce qu'il a un soutien populaire (...) c'est-à-dire les alaouites, les chiites et les chrétiens pour une large part, les chrétiens d'Orient ». Admettons. Mais, il faudra qu'Alain Juppé explique à son adversaire d'une part, que tout ce beau monde réuni, ne constitue même pas 25% de la population syrienne et d'autre part, que si Assad est toujours au pouvoir c'est grâce à la tyrannie et à la barbarie familiales, mises en place en 1970 et qui se sont illustrées à d'innombrables reprises depuis, en Syrie comme au Liban. Et puisqu'il y est, qu'il lui explique aussi ce qu'il voulait dire par « il n'y aura pas de retour à la paix en Syrie avec Bachar el-Assad ». Les Assad sont sans l'ombre d'un doute l'une des pires malédictions de l'histoire contemporaine du Moyen-Orient.

13. La naïveté de Fillon l'a même poussé l'autre soir à avancer des justifications simplistes à ses choix politiques. « Ils le défendent (voir point 12) parce qu'ils savent qu'en cas de chute du régime, ce sont les sunnites qui prendront le pouvoir, et si les sunnites prennent le pouvoir, pour les chrétiens c'est la valise ou le cercueil ». Notez bien que selon ce prétendant à la présidence de la République française, « les sunnites », tous les sunnites, vont foncer sur « les chrétiens », tous les chrétiens, pour les foutre dehors et les massacrer. Roi de la finesse et de la dentelle Fillon ! Il est indigne d'un présidentiable de tenir des propos aussi grotesques, malhonnêtes et islamophobes. En tout cas, de grâce que le candidat républicain et sa porte-parole s'abstiennent une fois pour toutes de parler en mon nom, en nos noms et au nom des Chrétiens d'Orient, ça serait mieux. L'histoire du Liban prouve à quel point la tyrannie des Assad, père et fils, a joué un rôle fondamental dans l'affaiblissement des communautés chrétiennes du pays du Cèdre et dans leur martyre depuis 1976 jusqu'à nos jours. Libre à eux de jouer aux « idiots utiles » pour Poutine et Assad. Mais avant d'engager la France, ils devraient savoir que tout ce qui renforce le régime alaouite de Bachar el-Assad, qui est issu d’une communauté minoritaire qui ne représente que 10% de la population syrienne, renforcera les islamistes de Daech & Co, qui sont issus d’une communauté majoritaire sunnite qui représente 70 % de la population syrienne et de dizaines de milliers de combattants étrangers sunnites sensibles à l’agonie du peuple syrien et réceptifs à la propagande jihadiste. Assad va de pair avec Daech. Il faut se débarrasser des deux. A défaut, le monde aura les deux.

14. Parlons peu, parlons bien. En s'alliant avec Vladimir Poutine et en soutenant Bachar el-Assad, qu'importe les prétextes, François Fillon renforcera le pouvoir tyrannique de ce dernier, qui s'est révélé au fil des décennies être particulièrement nuisible pour les peuples syrien et libanais en général, et pour les communautés sunnite et chrétienne en particulier. Par une démarche de réhabilitation de ce régime criminel, en décidant de rouvrir l'ambassade de France à Damas, François Fillon renforcera les alliés de ce dernier, les extrémistes chiites, comme le Hezbollah et la République islamique d’Iran, dont l’objectif reste l’établissement d’une République islamique chiite au Liban, comme l’a rappelé le numéro deux du Hezbollah, cheikh Naïm Qassem, en début d’année. Pire encore, en soutenant Assad, François Fillon poussera une frange de personnes anti-Bachar de confession sunnite, de Syrie et du monde arabe, comme de France et d’ailleurs, à se radicaliser pour venir grossir les rangs de ces organisations terroristes. Pour justifier l'injustifiable dans la politique étrangère qu'il concocte pour la France, François Fillon prétend qu'on a tout essayé en Syrie, cela a échoué et qu'il est temps de changer de tactique. Il a raison sur toute la ligne. Mais au fait, qu'a-t-on essayé au juste depuis 2011 ? Eh bien, tout ce que la communauté internationale a réussi à faire durant les six dernières années c'est de laisser Bachar el-Assad, Ali Khameneï et Vladimir Poutine, régler par le fer, le feu et le sang, le problème en Syrie ! Six ans plus tard, nous sommes à 300 000 morts, une Syrie vidée de la moitié de ses habitants et un pays dévasté. 

15. Ainsi, la politique étrangère irresponsable prônée par François Fillon, menacera l’ensemble des populations syrienne et libanaise, les chrétiens et les musulmans en Orient, prolongera le conflit syrien ad vitam aeternam, jettera davantage de migrants syriens sur les routes de l’Europe et menacera la sécurité du monde. Assad et Daech sont deux formes différentes de fascisme, d’une barbarie comparable. Que ça plaise à François Fillon ou pas, les deux sont condamnés à disparaitre. En attendant, il s'est mis du mauvais côté de l’histoire. Bachar el-Assad et Vladimir Poutine portent une très lourde responsabilité dans le chaos qui règne au Moyen-Orient. Il est déshonorant à la France de s'y associer. Pour l'éviter, il faut tout faire pour barrer la route à François Fillon, même en votant Alain Juppé. Avis aux peuples de gauche et du centre. Il vaut mieux le faire à la Primaire que lors de l'élection présidentielle proprement dite. Car là, on risque de ne pas avoir le choix. Il y aura peut-être Marine Le Pen en face. A bon entendeur, salut !