mercredi 20 septembre 2017

La 72e Assemblée générale de l'ONU et ses face-à-face : Macron vs. Trump, climat vs. Corée, la Coalition vs. l'Axe, les Forces démocratiques syriennes vs. Daech, et j'en passe et des meilleurs (Art.467)


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C'est la grand-messe diplomatique à New York. A l'honneur, l'Orient dans tous ses Etats, qu'il soit Proche, Moyen ou Extrême. Il sera question de l'interminable guerre en Syrie, de l'anéantissement imminent de Daech en Irak, de l'émergence incontournable du Kurdistan, de la remise en cause de l'accord international conclu avec l'Iran sur son programme nucléaire, au grand bonheur d'Israël et au grand dam du reste du monde, de la persécution de la minorité musulmane des Rohingyas en Birmanie et de la menace nucléaire que fait peser sur le monde un sale petit morveux parachuté chef suprême de la République populaire démocratique de Corée. Non mais sans blague, cette fascination des tyrans de tous les temps pour la « démocratie ».

Au menu il y a forcément aussi le sujet le plus grave pour l'avenir de l'humanité. Ce n'est certainement pas Rocket-Man, l'homme-missile, surnom donné hier dans la cour de récréation de l'ONU par Donald Trump à son camarade Kim Jong-un. C'est le changement climatique induit par l'inconscience des êtres humaines, qui vivent encore au-dessus de leurs moyens, polluant la perle de l'Univers et gaspillant ses ressources avec une irresponsabilité effrayante. S'aidant d'Harvey, d'Irma, de José, de Katia, de Maria et de toute la famiglia d'ouragans et de cyclones de grande puissance, jamais Éole n'a été aussi déterminé à signifier à Donald Trump qu'il n'est qu'un bouffon et un désastre pour le monde.

« Le fléau de notre planète aujourd'hui est un petit groupe d'Etats voyous qui violent les principes sur lesquels l'ONU est fondée. » Le locataire de la Maison Blanche a parfaitement raison. Le problème c'est que cela s'applique aussi bien sur lui que sur l'autre morveux. Le fléau de notre planète aujourd'hui c'est surtout le dénommé Donald Trump, ce président de l'Etat le plus puissant qui fascine et façonne le monde, qui se comporte comme un voyou, menaçant de « détruire totalement la Corée du Nord », alors qu'il s'est permis de retirer son pays, les Etats-Unis, grand-pollueur et gros-gaspilleur, d'un accord international sur le climat conclu par 195 délégations du monde (2015), parce qu'il n'est pas conforme à sa philosophie égocentrique « America First », parce qu'il devait remplir son « devoir solennel de protéger l'Amérique et ses citoyens » et parce qu'en tant que président il ne pouvait pas « avoir d'autres considérations au-dessus du bien-être des citoyens américains ». On croit rêver.

Il l'a fait sachant que si on n'agissait pas tout de suite et d'une manière draconienne pour limiter les effets qui sont déjà là, l'élévation des températures de la Terre pourrait atteindre 3 à 5°C à la fin du siècle, entrainant de fréquentes périodes d'inondations, de canicule et de sécheresse, la montée des eaux se chiffrera en une dizaine de mètres dans certaines contrées, les réfugiés et les déplacés climatiques se compteront par centaines de millions, des milliers d'espèces disparaitront, la sécurité alimentaire de l'humanité sera sérieusement menacée, et le « 7e continent de plastique » deviendra certainement membre permanent du Conseil de sécurité de l'ONU. Et ça prétend « Make America great again ». Non mais quelle mouche a piqué une partie des Américains pour imposer au monde entier un bouffon de cette trempe ! En tout cas, le président français, Emmanuel Macron, a tenu à faire parvenir jusqu'aux oreilles de son homologue américain, qui n'a pas abordé une seule fois le sujet du climat, que « la France refusera toute escalade (...) c'est intempestif de mettre en avant la menace (de guerre contre la Corée du Nord) » et que « l'avenir du monde c'est celui de notre planète qui est en train de se venger de la folie des hommes (...) cet accord (sur le climat) ne sera pas renégocié ». Et paf, encore une ! Ah lui, il est passé maitre en claques.


Aux dernières nouvelles, le Nicaragua a finalement décidé de rejoindre le concert des nations sur ce sujet. De ce fait, les Etats-Unis se retrouvent seuls avec la Syrie, au ban des nations sur le réchauffement climatique. Qui l'aurait cru ! Ayant abordé le sujet en long et en large dans un article récent, quand le président américain avait annoncé le 1er juin le retrait de son pays de l'Accord de Paris sur le climat, je n'y reviendrai pas. Je me concentrerai sur un autre sujet qui marquera le débat annuel de la 72e Assemblée générale de l'ONU, qui se tient du 19 au 25 septembre, la « question d'Orient », qui est plus que jamais d'actualité.

Attendu parmi tous ces chefs d'Etat, le président de la République libanaise, Michel Aoun, ne manquera pas à l'appel. Il viendra à New York conter et raconter comment le Liban a vaincu Daech. Il n'abordera pas la fin farfelue du film. Et pour cause, il n'y a ni de quoi se gargariser ni de quoi pavoiser. Certains les ont déjà oubliés. Pas moi, pas vous, pas du tout. Les jihadistes évacués du Liban à la hâte et à la dérobée dans des bus climatisés et parfumés à l'eau de Cologne, sont bel et bien arrivés à bon port, sains et saufs, dans la région de Deir ez-Zor, à l'Est de la Syrie. Le Grand Sérail vient d'en avoir la confirmation via une carte postale postée il y a quelques jours. Que Bachar el-Assad et Hassan Nasrallah soient chaleureusement remerciés et qu'Allah leur accorde sa bénédiction, sans eux, l'Etat libanais se serait permis de déférer ces terroristes devant la justice des hommes. Mon Dieu, on y a échappé de peu !

Ce ne sont pas les chefs d'accusation qui manquaient. Le dossier était prêt et bien étoffé. Il ne manquait que le feu vert des dirigeants libanais, qui ont finalement préféré appliquer la politique de l'autruche, comme à l'accoutumée, et laisser faire l'Etat dans l'Etat : participation aux activités terroristes du groupe terroriste Daech, occupation illégale d'un territoire libanais pendant au moins quatre ans, attaques meurtrières contre les forces armées libanaises, organisation d'attentats terroristes au Liban ayant tué et blessé des dizaines de Libanais, enlèvement et prise d'otages, exécutions sommaires d'une douzaine de militaires libanais, dont au moins deux par décapitation barbare, et j'en passe et des meilleures. Le duo Assad-Nasrallah voulait que les Libanais croient qu'il ne s'agissait que d'aventuriers de l'extrême, de camping sauvage, de jets de pétards et de chasse sans permis.

Nous devons remercier également Vladimir Poutine, qui a demandé à la Coalition internationale, essentiellement américaine, de cesser le blocage du convoi terroriste au beau milieu du désert car cela gênait soi-disant l'aviation russe, et le très discret Ali Khameneï, Guide suprême de la République islamique d'Iran, le chef de ce qu'on peut désigner par l'Internationale Chiite, wilayat el-fakih, le responsable de facto des questions stratégiques touchant les membres de l'organisation, sans eux, cette exfiltration n'aurait jamais pu se concrétiser.

Ainsi, les jihadistes évacués du Liban, qui sont en majorité de nationalité syrienne, pourront maintenant s'attaquer à leur nouvelle mission, celle pour laquelle le tyran de Damas a accepté de les récupérer, non pour les beaux yeux du beau-fils du président libanais ni parce que le chef du Hezbollah serait allé à Damas plaider cette action humanitaire, mais pour qu'ils aillent combattre sur les fronts nord et est de Deir ez-Zor, afin d'empêcher les Forces démocratiques syriennes (FDS, une coalition de groupes armés syriens, kurdes et arabes, musulmans sunnites et chrétiens syriaques, soutenue par la Coalition internationale), qui contrôlent le Nord-Est de la Syrie, de progresser dans l'Est du pays. Eh oui, « l'évacuation de la honte » n'avait comme but principal que celui-là, tout le reste n'était que palabres et poudre aux yeux.

L'enjeu géo-polico-militaire actuel est donc le contrôle de la province et de la ville de Deir ez-Zor. Sur le terrain, il y a deux protagonistes : d'un côté, le régime de Bachar el-Assad, soutenu de diverses manières par l'Iran, le Hezbollah et la Russie, et de l'autre côté, les forces arabo-kurdes, les FDS, appuyées par la Coalition internationale arabo-occidentale. Les deux camps n'ont absolument pas les mêmes objectifs à Deir ez-Zor.

-> L'axe Damas-Beyrouth-Téhéran-Moscou vise principalement à renforcer le régime syrien (maintenant qu'il est sauvé grâce à l'intervention massive de la Russie depuis deux ans) et à gagner du terrain (comme à Alep), surtout par rapport aux troupes arabo-kurdes des FDS, qui constituent une relève sérieuse et inquiétant pour l'Axe, en cas de chute du régime et éclatement de la Syrie. La lutte contre Daech n'est pas l'objectif principal de l'Axe. Elle ne l'a jamais été, comme l'a confirmé le timing et le choix de la bataille d'Alep en décembre 2016, une ville où l'on n'avait pas vu un jihadiste de Daech depuis trois années. Cet objectif est invariable depuis le 11 mars 2011, la survie de la tyrannie alaouite des Assad face à la rébellion sunnite qui la menace dans son existence. La lutte contre l'Etat islamique, l'Axe le fait au cas par cas, au gré des intérêts sur le terrain. L'évacuation des jihadistes de Daech du Liban, leur accompagnement sous haute protection, leur ravitaillement en eau et en vivres pendant le blocage et leur installation en toute quiétude dans la province de Deir ez-Zor, l'a démontré magistralement.

-> La Coalition internationale arabo-occidentale vise principalement l'anéantissement de l'organisation terroriste Etat islamique, depuis sa constitution en août 2014. Cet objectif conduit une partie des 70 pays qui forment la Coalition à renvoyer le sort d'Assad aux calendes grecques, pour le moment. En tout cas, grâce aux 26 871 frappes aériennes de la Coalition contre les positions de Daech en Irak et en Syrie (assurées par les Etats-Unis à hauteur de 69% et 96%), et aux armées irakienne et libanaise, 90% du territoire irakien occupé par l'Etat islamique et 100% du territoire libanais occupé par Daech, ont été libérés. Le territoire de l'Etat islamique se réduit comme une peau de chagrin. La bande d'Abou Bakr el-Bagdadi est cantonnée en Syrie. Les forces arabo-kurdes, FDS, ont déjà conquis la veille ville de Raqqa, capitale de l'Etat islamique. Elles foncent sur le dernier véritable bastion de l'organisation terroriste, à Deir ez-Zor. Et voilà ce qui n'arrange pas les affaires de l'Axe, mais alors là, pas du tout. D'où le deal de la honte que l'Axe a conclu avec la succursale de Daech au Liban il y a quelques semaines. D'où aussi le raid effectué par l'aviation russe contre une position des FDS à l'est de l'Euphrate près de Deir ez-Zor, il y a quelques jours.

C'est donc une course contre la montre qui est engagée depuis plusieurs semaines, entre l'Axe et la Coalition, pour le contrôle de l'Est de la Syrie. En gagnant Deir ez-Zor, la Coalition et les FDS couperont ce qui reste du territoire de l'Etat islamique en deux et isoleront Daech essentiellement en Syrie, ce qui accélérera leur anéantissement en Irak. Par contre, il y a fort à parier que si on pouvait marquer les 320 jihadistes de Daech qui ont été évacués du Liban avec une puce électronique comme les bêtes, on pourrait facilement retrouver leurs traces sur le front nord de Deir ez-Zor, face aux forces arabo-kurdes, cohabitant pacifiquement avec les troupes du régime syrien. Contrairement à ce que l'on a pensé au départ, l'objectif de l'Axe n'a jamais été de faire passer ses combattants aguerris, qui rappelons-le sont de nationalité syrienne, de la frontière syro-libanaise à la frontière syro-irakienne, mais de les garder bel et bien en Syrie, pour contrer l'avancée spectaculaire des troupes sunnites arabo-kurdes, ceux qui combattent réellement les terroristes de l'Etat islamique.

Une dernière chose sur la Syrie. Devant ses homologues réunis à New York, Emmanuel Macron a affirmé que « les auteurs de l'attaque du 4 avril dernier devront être traduits devant la justice internationale et cela ne doit plus jamais se produire ». Il y a deux semaines, une enquête de l'ONU a désigné le régime terroriste de Bachar el-Assad comme le principal responsable de cette attaque chimique au gaz sarin sur Khan Cheikhoun, une ville du nord-ouest de la Syrie, menée dans le but de stopper une offensive rebelle importante sur Hama et qui a fait près de 557 blessés et 92 morts, dont 32 enfants. Une raison de plus, comme s'il en fallait!, qui devait dissuader beaucoup de gouvernements dans le monde, dont celui du pays du Cèdre, de renouer le contact avec Bachar el-Assad, qui devra un jour ou l'autre faire face aux crimes de guerre et crimes contre l'humanité qu'il a commis.